octobre 2021
2 ans après l’ouverture emblématique du jeu « Demandes de Valeurs Foncières » (DVF), nous avons croisé lors d’un atelier chez SPALLIAN les expériences de professionnels de l’immobilier avec notre regard de scientifiques de la donnée.
En termes monétaires, c’est le niveau de prix où tombent d’accord un acheteur et un vendeur. Pour estimer ce prix, plusieurs méthodes existent. La plus commune d’entre elles est l’approche comparative. La valeur de votre maison se détermine en observant des transactions réalisées sur des biens de même nature. Mais encore faut-il que cette information soit disponible et transparente.
Depuis quelques années, sous l’impulsion des législations open data en France, l’information « ouverte » sur les transactions immobilières foisonne. L’objectif majeur de cette démarche d’ouverture des données immobilières est de lever les situations d’asymétrie d’information qui peuvent exister sur ce marché. Et donc de vous permettre d’estimer la valeur de vos biens immobiliers.
DVF est un dispositif qui recense l’ensemble des transactions immobilières à titre onéreux intervenues sur le territoire français (à l’exception des départements du Bas-Rhin, Haut-Rhin, Moselle et de Mayotte).
Les données DVF sont issues des actes notariés et des informations cadastrales. Elles sont produites par la Direction Générale des Finances Publiques (DGFiP) pour constituer une base de données. L’objectif est de favoriser la transparence des marchés immobiliers et fonciers.
La mise à jour de ce jeu est effectuée de façon semestrielle (en octobre de l’année N pour le premier semestre de l’année N et en avril de l’année N+1 pour le deuxième semestre de l’année N).
Comme certains services essentiels tels que l’entretien des voiries, celui de la donnée bénéficie à des acteurs extrêmement divers, des entreprises privées ou publiques jusqu’aux particuliers.
La version Patrim Usagers, offerte depuis 2013 sous condition d’être connecté à son compte impots.gouv, avait pour but d’apporter à l’individu déclarant son patrimoine le même niveau d’information que l’administration fiscale.
De nombreux moments de vie – devenir propriétaire, gérer puis transmettre son patrimoine – requièrent des prises de décisions que l’observation des prix et caractéristiques d’autres transactions immobilières peuvent éclairer.
Pour cet usager, la clef est de disposer de références fréquemment mises à jour.
Les législations successives (ALUR, République numérique, ESSOC) ont peu à peu reconnu de nombreux autres usagers pour DVF, issus du monde institutionnel, académique puis économique.
Frédéric Blanc, chef de projet, sélectionne et organise l’accès aux données du marché immobilier pour les 46 bailleurs sociaux d’ALI qui gèrent plus d’un million de logements. Ces acteurs du mouvement HLM ont besoin de connaître les prix du marché libre, notamment pour positionner correctement les offres de logements locatifs intermédiaires (entre la location sociale et la location privée) et prévoir des programmes d’accession sociale à la propriété.
« Lors des comités d’engagement, la détermination d’un prix de revient est clef pour prendre des décisions sur un nouveau programme »
Pour les chargés de développement, disposer des données les plus fines et précises possibles est essentiel à l’évaluation du potentiel de leurs opportunités foncières. C’est bien ce que permet DVF : observer à quel prix ont été cédés des biens immobiliers à proximité, à l’adresse près.
Du côté des services chargés de stratégie marketing, le besoin est d’identifier des tendances de marché et élaborer des stratégies d’investissement à moyen/long-terme (déterminer les territoires sur lesquels construire dans les prochaines années). Des données macroscopiques telles que des agrégats à la commune seront alors recherchées : des jeux de données alternatifs comme la cartographie des Notaires, ou encore les indicateurs annuels et tri-annuels du Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement (Cerema), fournissent cette information.
L’évaluation de biens est leur métier. La collecte et la sélection de références de transactions sont un des points de départ du travail d’évaluation. Pour ce faire, ils s’appuient notamment sur l’outil des experts DVI (Données de Valeurs Immobilières), en partie adossé à DVF. L’usage qu’ils font de la donnée requiert une précision importante « D’autant plus lorsque nous évaluons la valeur d’un local commercial : si les numéros de rue manquent, la référence est inutilisable car les valeurs changent sensiblement à la dizaine de mètres près » selon Eric Delépine, Directeur Général de CEI.
Pierre-Yves Schokkaert, Responsable de missions, est souvent confronté à l’imprécision des catégories : « la typologie ‘Local industriel, commercial ou assimilé’ peut recouvrir des types de biens hétérogènes et, si nous cherchons des références de bureaux par exemple, nous sommes amenés à une vérification manuelle fastidieuse via Google Street View ».
Ces quelques limites les conduisent à compléter la donnée ouverte en achetant de la donnée privée pour les pallier. Celles-ci peuvent, par exemple, provenir de la base notariale BIEN.
la donnée DVF est regroupée au sein de fichiers qui rassemblent chacun les informations des transactions immobilières intervenues sur le territoire français sur une période de cinq ans. Ces fichiers sont disponibles au format CSV sur le site data.gouv.fr. Ils sont cependant assez complexes à exploiter, notamment du fait de leur poids (chaque fichier contient des centaines de milliers de lignes) mais aussi de l’organisation complexe de l’information (une mutation peut comprendre plusieurs dispositions, qui elle-même comprennent plusieurs parcelles, qui elles même abritent plusieurs locaux…)
Ces fichiers bruts sont diffusés sous Licence Ouverte. Cela a permis à d’autres acteurs volontaires de proposer de nouvelles versions retravaillées et adaptées à différents publics.
Etalab a développé une application qui permet, depuis son navigateur web, de visualiser les transactions immobilières sur une carte interactive découpée en parcelles cadastrales. D’autres acteurs, privés notamment, s’en sont saisies pour proposer des versions ergonomiques ou enrichies, comme le site Meilleurs Agents.
Dans une même logique d’ouverture et dans un souhait de mise à disposition d’outils opérationnels d’alimentation des observatoires, de suivi des politiques publiques et de définition des stratégies territoriales, le Cerema propose des formats améliorés des fichiers DVF, dont :
Elle reprend la donnée des fichiers bruts et la met à disposition dans une base de données structurée et géolocalisée de 17 tables (ce format peut faciliter leur exploitation pour les experts de la donnée), ainsi que dans des fichiers au format géospatial (à l’attention des géomaticiens).
Disponibles depuis 2010, ce qui apporte une antériorité intéressante pour les analyses de tendances de marché.
Fruit du croisement des Fichiers DVF avec les Fichiers Fonciers, ce croisement permet à DV3F de fournir un grand nombre d’informations sur les caractéristiques physiques des biens ainsi que des informations sur les propriétaires et acheteurs.
A la différence des autres bases et indicateurs évoqués dans le présent article, DV3F n’est pas publique mais réservée à certains ayants-droit (condition d’obtention et liste des ayants-droit disponibles ici)
Valoriser un bien, évaluer le potentiel d’une opportunité foncière, élaborer des stratégies d’investissement… comme nous l’avons vu, les usages de la donnée DVF sont multiples.
Chaque jeu ou version d’un jeu de données présente des avantages et des limites propres qui déterminent les usages qu’il privilégie. Parmi ces critères de qualification, on retrouve fréquemment, comme ici, le niveau d’expertise technique requis, la finesse (granularité) de la donnée, l’antériorité temporelle et la fréquence de rafraîchissement.
Enfin, la donnée DVF offre une excellente illustration des motivations et des effets de l’ouverture d’un jeu de données : les réutilisations ont été nombreuses et les enrichissements successifs pour répondre à des besoins et usages toujours plus nombreux, contribuant au maintien de l’intérêt qu’elle a initialement suscité.
Merci à Action Logement Immobilier, à CEImmo et au Cerema pour leur participation à cette démarche de partage et d’échange autour de l’open data immobilier.
Pour en savoir plus les usages de l’open data, découvrez notre article sur les finances publiques ainsi que celui sur le logement social.
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